segunda-feira, maio 04, 2009

Portraits d'Alsaciens : Albert Strickler, le poète du "rien somptueux"


Portraits d'Alsaciens : Albert Strickler, le poète du "rien somptueux"

La poésie et le monde du handicap: les deux univers d’Albert Strickler.
1 er novembre 2008. « Toussaint. L’âme est aussi maussade que le temps. Petit père a été hospitalisé d’urgence hier soir, et j’ai veillé avec lui toute la nuit sur le Mont des Oliviers ». 28 novembre, la situation ne s’est pas améliorée. « Pour voir Petit père maintenant, il faut mettre un masque et des gants […]. Le fagot d’os de son corps semble prêt pour l’ultime flambée. Mais tout en lui respirera la bonté jusqu’à la fin ». L’issue fatale survient le 21 décembre. « Petit père s’en est allé ce dernier dimanche de l’Avent. Il n’avait plus la force de souffler les bougies ».

Dans Au-dessus du brouillard, un pavé de 645 pages, Albert Strickler raconte au jour le jour son année 2008, qui se termine par la bouleversante évocation de la mort du père aimé. Petit père « à qui je dois, écrit-il, ma poétique du "rien somptueux"», un terme « emprunté à l’écrivain Georges Perros et que je ne lui ai jamais rendu ». Petit père qui « n’avait rien d’un héros et tout d’un humain ».

Au-dessus du brouillard, ce sont 645 pages en prose, dont chaque mot est « poésie pure, sans les béquilles de la rhétorique poétique », et où l’auteur quinquagénaire au physique de (presque) jeune premier, admirateur de Hölderlin et proche du poète genevois Georges Haldas, rapporte ses joies et ses peines, le tout, explique l’éditeur, « merveilleusement protégé de toutes les certitudes, sauf de celle de l’amour de la vie et du besoin de beauté ».
« Une façon d’être au monde »

Ce qu’Albert Strickler confirme : « Profondément attaché au… détachement et à la nature, je suis un poète de la joie, mais toujours liée à l’angoisse, qui est sa jumelle. Je peux me saouler de la vie ».

Volumes de journal, livres d’art et surtout recueils de poèmes : plus d’une vingtaine d’ouvrages publiés à ce jour — et une dizaine prêts à l’être — disent à quel point, chez cet enfant des bords du Rhin, né à Sessenheim, qui abrita les amours de Goethe et de Frédérique Brion, « être poète, ce n’est pas seulement écrire mais c’est une façon d’être au monde, avec un engagement pour l’être ». La poésie, un état qu’il découvre très tôt. « J’avais 8-9 ans quand j’ai entendu lire des poèmes de Verlaine. J’ai été fasciné par la musicalité de la langue. Ça m’a permis de comprendre qu’il existait deux types de langage : le langage de communication et la langue de communion. Une prise de conscience incroyable ! Avec les mêmes mots, on pouvait dire les choses de deux manières totalement différentes ». Pour autant, le poète découvrira aussi plus tard que « contrairement aux autres muses », la poésie « vous donne tout mais pas d’opportunité sur le plan alimentaire ». Un regret affleure : « Dans la liste des métiers, il n’y a pas poète. Tu es l’enfant chéri des muses mais l’enfant pauvre de la société ». Ce qui se traduit déjà, poursuit-il, par « une espèce de mise à l’écart » dans les librairies. Le rayon poésie ? « Quand il y en a un, c’est tout au fond ou au sous-sol »…

Quelle force, quelle puissance, quelle verve pourtant dans ce mode d’expression qui, chez Albert Strickler, « plus que de donner à voir comme disait Éluard », donne aussi « à sentir, à goûter » ! Les premières effluves viendront de la terre nourricière, le pays natal : la plaine d’Alsace, entre Moder et Rhin, « le Vater Rhein comme dit Hölderlin ». « Gage de fertilité, le fleuve portait aussi en lui la terreur de l’inondation. Un paysage qui a conditionné mon imaginaire », explique-t-il. Plus tard, la terre natale cédera le pas à la terre d’élection, quand Albert Strickler déménage en Centre Alsace. En 2003, l’installation à La Vancelle, dans une maison qu’avec sa compagne il baptise Tourneciel, sera une nouvelle « expérience fondamentale et fondatrice », en même temps que, la même année, cette autre qui lui fait découvrir le monde du handicap. Et le voici qui dirige, au sein du pôle intégration-autonomie de l’APEI Centre Alsace, L’Évasion, une structure unique en Alsace, qui offre à des handicapés de s’exprimer à travers la création artistique. « J’y ai découvert, dit-il, la simplicité et l’authenticité d’un monde où on ne peut pas tricher ». Comme en poésie ?
Lucien Naegelen
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FONTE (imagem incluída): Journal L'Alsace - Mulhouse,Alsace,France

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