Un «Faust-bal» à blanc
Lyrique. Composé sur un livret de l’écrivain iconoclaste Fernando Arrabal et en création mondiale à Madrid, l’opéra rate sa cible.
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Envoyé spécial à Madrid éric DAHAN
Lyrique. Composé sur un livret de l’écrivain iconoclaste Fernando Arrabal et en création mondiale à Madrid, l’opéra rate sa cible.
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Envoyé spécial à Madrid éric DAHAN
Faust-bal opéra de Leonardo Balada, livret de Fernando Arrabal. Orchestre et chœur du Teatro Real. Dir. Jesús López Cobos, ms Joan Font. Jusqu’au 23 au Teatro Real de Madrid. Loc. : (00 34) 902 24 48 48.
Lié aux noms de Breton, Tzara, Topor et Jodorowski, Fernando Arrabal, 76 ans, fait partie des légendes subversives de la culture européenne, avec 7 films, 100 pièces de théâtre, 14 romans et 800 volumes de poésie. On connaît moins ses nombreux livrets d’opéra dont quatre ont été mis en musique. Après Milko Kelemen (Apokaliptica), Marcel Landowski (l’Opéra de la Bastille), Ostfiend Busing (Pic-nic im Felde) et Constantino Stylianou (Guernica), c’est au Catalan Leonardo Balada, né en 1933, qu’a été confié Faust-bal, créé ce week-end dans la capitale espagnole.
Choc. Revisitation féministe et heroic fantasy du mythe de Goethe mais également du docteur Faustroll d’Alfred Jarry, Faust-bal, du nom de son héroïne, se passe au troisième millénaire. Les didascalies d’Arrabal évoquent son combat à une vitesse supersonique pour que du choc apocalyptique des civilisations, orchestré par le vilain Margarito, triomphent le Bien et l’Amour. Autant dire que cette dramaturgie, proche des comics Marvel, et ces textes, évoquant le Diamond Dogs orwellien de David Bowie, pouvaient stimuler l’imagination d’un compositeur et d’un metteur en scène.
Hélas, l’un comme l’autre ont échoué à donner chair, lumière et vitesse aux délires de l’autoproclamé «Grand Masturbateur». Dans un premier temps, le duo catalan La Fura dels Baus y avait été invité. Est-ce à la lecture du livret ou de la partition qu’ils ont décliné l’offre ? Ils ont préféré accepter celle de la Monnaie de Bruxelles qui leur a offert de livrer, en mars, sa version attendue du Grand Macabre de Ligeti, mètre-étalon de l’opéra contemporain de ces trente dernières années. Difficile de lutter avec le cynisme ligetien d’une apocalypse qui ne change rien - à faire passer Arrabal, malgré ses fulgurances poétiques, pour un gentil baba cool. Difficile de lutter avec le torrent perpétuel d’inventions cinglantes de la musique du Grand Macabre.
En petit maître, comme on dit en peinture, Balada mêle atonalité et consonance, rythmes de danse issus du folklore et figures obligées de l’avant-garde contemporaine. Il connaît son métier, produit des alliages instrumentaux stridents et cristallins comme tout bon spectral, déflagrations en chaîne comme un honnête boulezien, et chœurs d’enfants planants pouvant faire illusion si l’on ne connaît pas l’Outis de Berio. Il ne manque que l’étincelle qui fait que la somme des parties produit un tout animé, un organisme pétri de déductions en temps réel. Ultime bémol : Joan Font et ses Comediants jouent la carte Star Trek plutôt que Star Wars. Un décor unique, monumental, de château de l’espace : au sommet, sous belvédère, trône un Dieu, sosie de Michel Polnareff époque Monceau revu Ken Russell ; à terre, c’est du mauvais Shakespeare.
Destruction. Atout de tout bon opéra, la caractérisation schématique des voix - du Dieu, chanté par une basse profonde, à Faust-bal confié à une soprano virginale, en passant par le ténor de la destruction Margarito, en cuir rouge - n’est pas un point de départ mais d’arrivée pour des airs qui sonnent comme un interminable récitatif.
Loin du mec qui s’allumait la bite dans J’irai comme un cheval fou, de la mise à nu de la terreur franquiste dans Viva la muerte, on se demande comment un compositeur et un metteur en scène ont pu faire un coup pareil à Arrabal, même en phase Barjavel.
Lié aux noms de Breton, Tzara, Topor et Jodorowski, Fernando Arrabal, 76 ans, fait partie des légendes subversives de la culture européenne, avec 7 films, 100 pièces de théâtre, 14 romans et 800 volumes de poésie. On connaît moins ses nombreux livrets d’opéra dont quatre ont été mis en musique. Après Milko Kelemen (Apokaliptica), Marcel Landowski (l’Opéra de la Bastille), Ostfiend Busing (Pic-nic im Felde) et Constantino Stylianou (Guernica), c’est au Catalan Leonardo Balada, né en 1933, qu’a été confié Faust-bal, créé ce week-end dans la capitale espagnole.
Choc. Revisitation féministe et heroic fantasy du mythe de Goethe mais également du docteur Faustroll d’Alfred Jarry, Faust-bal, du nom de son héroïne, se passe au troisième millénaire. Les didascalies d’Arrabal évoquent son combat à une vitesse supersonique pour que du choc apocalyptique des civilisations, orchestré par le vilain Margarito, triomphent le Bien et l’Amour. Autant dire que cette dramaturgie, proche des comics Marvel, et ces textes, évoquant le Diamond Dogs orwellien de David Bowie, pouvaient stimuler l’imagination d’un compositeur et d’un metteur en scène.
Hélas, l’un comme l’autre ont échoué à donner chair, lumière et vitesse aux délires de l’autoproclamé «Grand Masturbateur». Dans un premier temps, le duo catalan La Fura dels Baus y avait été invité. Est-ce à la lecture du livret ou de la partition qu’ils ont décliné l’offre ? Ils ont préféré accepter celle de la Monnaie de Bruxelles qui leur a offert de livrer, en mars, sa version attendue du Grand Macabre de Ligeti, mètre-étalon de l’opéra contemporain de ces trente dernières années. Difficile de lutter avec le cynisme ligetien d’une apocalypse qui ne change rien - à faire passer Arrabal, malgré ses fulgurances poétiques, pour un gentil baba cool. Difficile de lutter avec le torrent perpétuel d’inventions cinglantes de la musique du Grand Macabre.
En petit maître, comme on dit en peinture, Balada mêle atonalité et consonance, rythmes de danse issus du folklore et figures obligées de l’avant-garde contemporaine. Il connaît son métier, produit des alliages instrumentaux stridents et cristallins comme tout bon spectral, déflagrations en chaîne comme un honnête boulezien, et chœurs d’enfants planants pouvant faire illusion si l’on ne connaît pas l’Outis de Berio. Il ne manque que l’étincelle qui fait que la somme des parties produit un tout animé, un organisme pétri de déductions en temps réel. Ultime bémol : Joan Font et ses Comediants jouent la carte Star Trek plutôt que Star Wars. Un décor unique, monumental, de château de l’espace : au sommet, sous belvédère, trône un Dieu, sosie de Michel Polnareff époque Monceau revu Ken Russell ; à terre, c’est du mauvais Shakespeare.
Destruction. Atout de tout bon opéra, la caractérisation schématique des voix - du Dieu, chanté par une basse profonde, à Faust-bal confié à une soprano virginale, en passant par le ténor de la destruction Margarito, en cuir rouge - n’est pas un point de départ mais d’arrivée pour des airs qui sonnent comme un interminable récitatif.
Loin du mec qui s’allumait la bite dans J’irai comme un cheval fou, de la mise à nu de la terreur franquiste dans Viva la muerte, on se demande comment un compositeur et un metteur en scène ont pu faire un coup pareil à Arrabal, même en phase Barjavel.
FONTE: Libération - Paris,France
http://www.liberation.fr/ Imagem: Faust-bal
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