quinta-feira, março 20, 2008

Claude Royet-Journoud et Emmanuel Hocquard : éclipses et éclats


Critique
Claude Royet-Journoud et Emmanuel Hocquard : éclipses et éclats
LE MONDE DES LIVRES 20.03.08 12h06 • Mis à jour le 20.03.08 12h06

"Un métier d'ignorance" : c'est ainsi que Claude Royet-Journoud définissait la poésie dans un texte de 1987. Emmanuel Hocquard parlait, lui, de "modernité négative". Ensemble, ces deux grands poètes ont été à l'origine d'anthologies, dont 49+1 nouveaux poètes américains (Royaumont, 1991). Publié naguère par Hocquard aux éditions Orange Export Ltd, Royet-Journoud l'a invité en 1986 dans sa revue L'In-plano. Ils publient aujourd'hui deux remarquables recueils.

"Presque invisible, écrit Claude Royet-Journoud, la préposition hante la langue et plus particulièrement la langue de poésie. Elle l'aimante, la creuse, la bouleverse." Le titre de son recueil, La Théorie des prépositions, se réfère à la fois au linguiste danois Viggo Brondal et au poète "objectiviste" Louis Zukofsky - cité dans La poésie entière est préposition (Eric Pesty 56 p., 12 €). Ce petit livre très éclairant rassemble les notes des carnets de Royet-Journoud, depuis Les objets contiennent l'infini (Gallimard, 1983).

"La minutie me fascine", dit ce poète, qui cite Aristote et Wittgenstein. Sa poétique, radicale, implique "un travail de suppression". Il s'agit d'articuler, de dénuder. "Ecrire, c'est être capable de montrer l'anatomie. Il faut aller jusqu'au bout du littéral." Cette poésie ne s'approche de "l'intime" que fugacement : "feu dont les périodes de lumière, dites éclats, sont nettement plus courtes que les périodes d'obscurité, dites éclipses".

Si Claude Royet-Journoud évoque "la science des traces (ichnologie)" du préhistorien, la figure de l'archéologue traverse les livres d'Emmanuel Hocquard. Notamment Une grammaire de Tanger (CIPM 10 €), magistrale et succincte autobiographie d'écrivain. Parallèlement paraissent les "élégies" de Conditions de lumière. Le recueil, qui s'ouvre sur une citation de l'Eclipse d'Antonioni, est, ainsi que Les Elégies (POL 1990), éloigné de l'effusion. "L'élégie n'est pas dans les mots de la plainte Elle est dans la répétition des mots de la langue Elle est cette répétition La langue tout entière est élégie."

Vingt et une sections de cinq suites de quintils en prose : série de fragments compacts, dont le format même du livre, petit, presque carré, donne la sensation tactile. Des cartes postales, des énoncés colorés, odorants, "insensés, mais évidents", dont chaque mot résonne. C'est un recueil particulièrement accompli, d'une infinie beauté. "Il n'y a pas de formulation première Il n'y a que recueillir Dans une coupe en verre (...) Nous disions la littéralité. La littéralité est éblouissante".


FONTE (image include): Le Monde - Paris,France

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